Les travaux de développement en cours sur les deux sites offshore de GTA et Sangomar permettront au Sénégal de tirer des ressources financières très importantes à partir de leur mise en service fin 2023. Présentation de ces sites de production avec Jean-Michel Seck, ancien directeur général de la Société Africaine de Raffinage (SAR) et ingénieur en économie pétrolière de formation.

Les noms de Grand Tortue/Ahmeyim (GTA) et Sangomar ne sont peut-être pas encore familiers à l’oreille de tous les sénégalais, mais les professionnels de l’énergie ont appris à les positionner sur une carte. Depuis leur découverte en 2014 (pétrole) et 2015 (gaz naturel), les travaux sont en cours pour exploiter ces gisements de pétrole et de gaz qui vont contribuer au développement du Sénégal. Deux projets qui représentent de belles opportunités dans un contexte de raréfaction des ressources. Au niveau international, difficile d’ignorer en effet l’explosion du prix de l’énergie. Les causes sont multiples – conflit en Ukraine, demande forte pour relancer une économie post-Covid encore atone, coûts d’extraction de plus en plus élevés – et la hausse du gaz et du pétrole pèse sur le pouvoir d’achat des particuliers et la capacité d’investissement des entreprises. Avec une inflation à 8,9 % sur un an au mois de juin 2022 (un niveau plus vu depuis 2006), le Sénégal subit un “effet ciseau” avec des tensions à la fois sur l’énergie mais aussi sur les denrées alimentaires et la parité euro-dollar.

Pétrole au Sénégal : 60 ans d’histoire

Alors que l’épuisement mondial des énergies fossiles constitue un défi majeur pour l’humanité dans les années à venir, l’opportunité pour le Sénégal de devenir un pays producteur et exportateur de pétrole et de gaz semble représenter une heureuse conjoncture. Dans les faits, le Sénégal a une relation de longue date avec la production et le raffinage de pétrole, avec la SAR, en service depuis 1964 à Mbao près de Dakar. « Peu de gens le savent, mais on a extrait du pétrole au Sénégal depuis une trentaine d’années, rappelle Jean-Michel Seck. Mais les quantités étaient très faibles, de l’ordre de 400 à 500 tonnes de pétrole brut par an. » Jean-Michel Seck a passé une large partie de sa carrière à la SAR avant de diriger la raffinerie entre 2004 et 2008. « Mais aujourd’hui la situation est bien différente, poursuit celui qui est aujourd’hui conseiller spécial du Président de La Banque Outarde, M. Abdoulaye Diao. D’abord car les gisements ne sont plus des gisements on-shore (sur le continent) mais des gisements off-shore (au fond de l’océan) à une centaine de kilomètres de côtes. Les volumes sont importants tant pour le pétrole que pour le gaz. »

Une aubaine pour l’économie du Sénégal et de la sous-région

À la limite de la frontière avec la Mauritanie, le site de GTA va extraire du gaz dit “naturel” avec un potentiel d’exploitation estimé à 1 400 milliards de m³. Une douzaine de puits d’extraction plongent à 2 700 mètres de profondeur pour faire remonter le gaz à travers un réseau de canalisations sur un navire (FPSO) chargé de traiter et de stocker avant transfert vers une unité flottante de liquéfaction du gaz naturel extrait. Cette unité flottante de liquéfaction aura une capacité initiale de production de 2,5 millions de gaz naturel liquéfié (GNL) par an pour ensuite atteindre une capacité de 10 millions de tonnes par an. La liquéfaction du gaz permet de réduire considérablement son volume – d’un facteur 600 – sans perdre son pouvoir calorifique, contribuant à le rendre facilement transportable et commercialisable. La production de gaz naturel liquéfié est destinée à l’exportation à l’aide de méthaniers (navires).

Le site de Sangomar est quant à lui un site d’extraction de pétrole brut, dont une partie sera raffinée à la SAR dans un objectif de consommation nationale, alors que le reste sera destiné à l’export. « La capacité de production sera de 100 000 barils par jour, soit trois millions de barils par mois, précise Jean-Michel Seck. “Pour vous donner un ordre d’idée, c’est l’équivalent de trois fois ce que la SAR raffine et commercialise sur le marché intérieur. On va mélanger le brut de Sangomar avec du pétrole brut en provenance du Nigéria. » Des barils seront vendus sur les marchés internationaux, ce qui va générer une rentrée de devises.

Quel rôle pour les banques régionales ?

Vous l’aurez compris, ce marché constitue une manne financière qui va contribuer au développement du Sénégal. D’après le document de programmation budgétaire et économique pluriannuel (DPBEP) 2023-2025, le Ministère des Finances anticipe 500 milliards de FCFA de recettes annuelles liées à l’exportation du pétrole et du GNL dès 2025. « Ces recettes en devises sont une excellente chose pour le développement de notre pays, se réjouit Jean-Michel Seck. C’est la société Petrosen Trading et Services qui va commercialiser, en principe, la part de l’Etat (pétrole brut) sur les marchés internationaux. Or les devises tirées de l’exportation devraient être domiciliées dans les banques installées au Sénégal. La Banque Outarde connaît les acteurs, les mécanismes et maîtrise l’information commerciale et technique. Elle est bien placée pour en bénéficier. »

Les banques vont également avoir un rôle d’appui aux sociétés locales du secteur de l’énergie, en particulier sur l’aval pétrolier : raffinage, stockage, distribution. Enfin, les banques les plus expertes sauront accompagner l’Etat sénégalais et ses entités publiques pour la production des contrats ou encore la structuration des sociétés pétrolières d’Etat. L’énergie est un outil du développement du Sénégal, et La Banque Outarde met son expertise au service de l’Etat et des entreprises et entrepreneurs du pays.

La Banque Outarde, l’énergie du Sénégal au cœur de son ADN

« Nous sommes positionnés sur le secteur “Oil and Gas”, que nous connaissons bien. Nous consacrons une partie de notre capital à l’accompagnement des champions sénégalais, ceux d’aujourd’hui et de demain », rappelle Olivier Santi, directeur général de La Banque Outarde. En effet, son principal actionnaire M. Abdoulaye Diao a construit l’une des principales sociétés de négoce pétrolier et gazier en Afrique de l’Ouest. Il a souhaité créer LBO, la banque des entrepreneurs et des entreprises, pour favoriser l’émergence d’acteurs sénégalais innovants et structurants sur des marchés-clés de l’économie, dont l’énergie occupe un rôle central. « Grâce à notre Président, des membres éminents du Conseil d’Administration et des équipes commerciales dédiées, nous su développer une offre particulière qui mêle capital et conseil. Nous avons une vraie légitimité dans l’industrie du pétrole et du gaz, avec des engagements importants sur nombre d’acteurs existants et d’autres sur des entreprises et des sous-secteurs en devenir ». Et Olivier Santi d’appeler à un rapprochement des banques sénégalaises, sinon ouest-africaines : « Pour parvenir à prendre position sur toute la chaîne de valeur de l’énergie, notamment l’amont, nous avons besoin d’une syndication bancaire de place, en tout cas d’une alliance avec d’autres banques locales pour être plus forts ensemble. »